Nada Zéro
Mail art Internation'Alle

Là je suis seul, bien, je me sens bien et rien, plus rien ne m'impressionne
Lentement je regarde autour de moi

Seul

Et c'est très bien
Du haut de ce pont je domine le monde
Je le maîtrise.
Je lève les bras comme un oiseau et comme lui je sens

Le vent

Fier, heureux et sereinement je me laisse
Tomber

Je passe
Au
Tout

Tout
Défile
Tout
Me
Frôle

Pourtant je n'ai plus rien à quoi me raccrocher

Je sais

Tant pis
Je pense être le monde

Alors
Je
Ferme
Les
Yeux

Je sais au fond de moi que rien n'est plus beau que ce qui m'entoure.
Que rien ne vaut plus que l'amour que l'on me porte.
Je sais aussi que tout compte

Sauf moi

Alors
Oui
je suis heureux

Je ne sens plus que le vent qui siffle maintenant dans mes oreilles

Ce vent qui refroidit mon corps,
Qui prend
De plus
En
Plus
De
Vitesse

Et pourtant
Pourtant je suis calme, et je sourie.
J'étais bien, j'étais petit et n'ai jamais grandi
C'était bien.
Je courrais, je riais et ai toujours regardé ce monde sans le comprendre

Je dois être à l'endroit car tout me semble clair, tout s'explique soudainement

J'ai peur

Mais c'est trop tard

Patrick Poirier
9 résidence de Kerhamon
29260 Lesneven - FRANCE

L’encre de l’automne
d’un rouge miel
      S’arrache du souvenir
            Esquisse l’avenir

sur la page odoriférante de l’humus

Béatrice Gaudy
155 rue de Grenelle
75007 Paris - France

Je me souviens d'eux.
De ces rires, de ces pleurs, mais je ne voulais pas les entendre.

Je n'étais fait que pour avancer.

Derrière, le paysage disparaissait au fur et à mesure.
Le noir remplissait mon cœur, mon esprit et bientôt mon âme, mais j'avançais.

Je me souviens d'eux, de leurs voix, de leurs cris.
Ils se battaient les uns contre les autres.
J'étais d'eux, mais de quel bord... je ne me rappelle plus.
Ils hurlaient, tous hurlaient, eux et leurs armes.

Nos armes, mon arme.
La vie n'était plus, la mort non plus... tout me semblait vide, dénué de sens mais j'avançais.

Je regardais ce chien qui dévorait ce qui était un homme, je crois.
Je m'aperçus en le voyant que je ne savais plus ce qu'était manger.
Tous, hommes, animaux, nous nous dévorions tous.

Ne me demandez pas pourquoi, ni pour qui : je ne peux vous répondre, tout ce que je sais c'est que j'avançais, encore et toujours.

J'attendais mon arrêt.

Je le savais brutal, dur, mais rapide et sans mal.
Je ne vivais de toute façon plus depuis longtemps.
Des fantômes hantaient mes nuits, et d'autres mes jours.
Je ne savais même plus dormir, même plus vivre.

Mais j'avançais, toujours.

Et puis un jour, ou une nuit... je me suis arrêté... enfin je crois.
J'ai senti mes jambes fléchir.
Cela faisait longtemps que je souffrais et soudain je ne sentais plus rien. Et puis j'ai senti le froid de la neige sur mon visage. J'aurais voulu fermer les yeux, ne pas me salir comme le voulait ma mère.
Je ne sentais plus rien, à part ce filet de chaleur couler sur mon front.
Je ne voyais plus rien à part ce rouge dans la neige.

Je n'avançais donc plus, tant mieux pour eux.

Patrick Poirier
9 résidence de Kerhamon
29260 Lesneven - FRANCE