Nada Zéro
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Vagues abordages

Laisse-toi porter
Au fil de l’eau
Chien de galère,
Voyageur aux souliers de vent.
Ta chambre est frisquette
Mais évite les auberges aux maîtres féroces.
Et couche avec les lampadaires de ta rue.
Ils ne veulent rien de ta folie
Les petits hommes honnêtes
Comme des verres de gros rouge,
Ils se pavanent au P.M.U.
Devant un pot de bière rousse
Ou de pastis multicolore,
Les dimanches fades comme le sang.

Qu’importe,
S’ils te considèrent errant,
Toi, l’abeille sans ruche,
L’écrevisse sans rivière,
La kermesse sans cons,
Qui n’a d’entraves
Que l’ombre dormante
Et le vent rieur.
Et d’autres huissiers
Que la pluie roide et les ronces vives.
Ami, à mort, frère,
Tu sais que la Liberté,
C’est de te moquer
Comme de ta première échalote
De ce qu’on peut penser de toi.

Au soir,
Tu pénètres dans la cité,
A l’heure où,
Sous les toits,
Tintent les fourchettes
Et où les tévés
Pissent leurs feuilletons.
Tu te laisses glisser
Telle une anguille solitaire
Vers les bas quartiers
Où ne rosissent point
Les femmes à la chair chatoyante.

Quand tu as quelque trèfle en poche
Et le bélier qui te picote,
Tu négocies la tendresse
D’une poupée d’amour
Aux dents en couteaux,
Qui te déchirera le cœur
Que tu as, matou d’opérette,
Aussi tendre qu’un Modigliani.

Au petit matin, entre deux rues
Puant l’urine et le hareng fumé,
Tu apparais,
Enluminé comme un incunable
Et gai comme un pipeau.
« C’est étonnant,
Disent les passants secs et sévères,
Ces êtres n’ont aucune fierté. »
Et bien d’autres sentences
Qui sont loin de couvrir
Le grondement de naufrage
De ton ventre vide
Comme une villa romaine.
« Hé mec!
T’as pas cent chars,
Une cigarette?
Hein ? Non !
Va donc faire l’amour avec ton dogue.
Moi demain je pars tôt
Me perdre au fil de l’eau,
Trimarder, enivrer mon cœur,
Cogner le monde.
Ah! Nature,
Comme j’ai besoin de toi.
Apprends-moi
A rire de moi.
A aborder l’infini.
Ô Îles !!! »

23 décembre 2006 au soir